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2. Doit-on douter de tout ?

Sommaire

La question du scepticisme

Scepticisme : doctrine grecque fondée par Pyrrhon d’Elis qui considère que rien n’est jamais certain et donc que la raison est incpapable de découvrir des vérités.

Dogmatisme (sens premier) : doctrine qui considère que l’on peut accéder à des vérités définitives. Ce sont les sceptiques qui appellent « dogmatiques » les philosophes qui affirment pouvoir découvir des vérités.

Pyrrhon d’Elis (env. 365–275 av. J.-C.) est le fondateur de l’école sceptique. Sextus Empiricus est son disciple le pus connu (IIe. S. après J.-C.) : il écrira les Esquisses Pyrrhoniennes (alors que Pyrrhon n’a lui-même rien écrit).

Repères du programme : vrai, probable, certain

Le scepticisme considère qu’aucune certitude n’est possible, donc que l’on ne peut rien dire de vrai. Nos connaissances sont donc seulement probables.

Vrai Ce qui correpond à la réalité (vérité de fait) ou ce qui n’implique pas de contradiction (vérité de raison).
Probable Ce qui n’est pas certain, mais seulement vraisemblable. Cela semble vrai, c’est-à-dire : cela a plus de chance d’être vrai que faux, mais on ne peut pas en être certain.
Certain Ce dont nous ne pouvons pas douter, ce dont nous savons la vérité car cela ne peut pas être réfuté.

2.1. Un exemple de dogmatisme

Épicure, Lettre à Ménécée (IIIe s. avant J.-C.)
Et maintenant y a-t-il quelqu’un que tu mettes au-dessus du sage ? Il s’est fait sur les dieux des opinions pieuses ; il est constamment sans crainte en face de la mort ; il a su comprendre quel est le but de la nature ; il s’est rendu compte que ce souverain bien est facile à atteindre et à réaliser dans son intégrité, qu’en revanche le mal le plus extrême est étroitement limité quant à la durée ou quant à l’intensité ; il se moque du destin, dont certains font le maître absolu des choses. (…)
Médite donc tous ces enseignements et tous ceux qui s’y rattachent, médite-les jour et nuit, à part toi et aussi en commun avec ton semblable. Si tu le fais, jamais tu n’éprouveras le moindre trouble en songe ou éveillé, et tu vivras comme un dieu parmi les hommes.
1. Qu’est-ce qu’un sage, selon Épicure ?
2. Que permet la vérité ?

2.2. Le doute sceptique

Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique (IVe siècle après J.-C.)
Il est nécessaire, avant tout, de faire porter l’examen sur notre pouvoir de connaissance, car si la nature ne nous a pas faits capables de connaître, il n’y a plus à poursuivre l’examen de quelque autre chose que ce soit. Il y a eu, effectivement, autrefois, des philosophes pour émettre une telle assertion (…) Pyrrhon d’Elis soutint en maître cette thèse. Il est vrai qu’il n’a laissé aucun écrit, mais Timon, son disciple, dit que celui qui veut être heureux a trois points à considérer : d’abord quelle est la nature des choses ; ensuite dans quelle disposition nous devons être à leur égard ; enfin ce qui en résultera pour ceux qui sont dans cette disposition. Les choses, dit-il, il les montre également indifférentes, immesurables, indécidables. C’est pourquoi ni nos sensations, ni nos jugements, ne peuvent, ni dire vrai, ni se tromper. Par suite, il ne faut pas leur accorder la moindre confiance, mais être sans jugement, sans inclination d’aucun côté, inébranlable, en disant de chaque chose qu’elle n’est pas plus qu’elle n’est pas, ou qu’elle est et n’est pas, ou qu’elle n’est ni n’est pas. Pour ceux qui se trouvent dans ces dispositions, ce qui en résultera, dit Timon, c’est d’abord l’aphasie, puis l’ataraxie.
1. Quel problème pose Eusèbe de Césarée au début du texte ?
2. Quelle thèse soutient Pyrrhon d’Elis ?
3. Quelles sont les trois questions que pose Timon, disciple de Pyrrhon ?
4. Quelles sont les trois réponses qu’il y apporte ?
5. Que peut-on en conclure à propos de la vérité et du bonheur ?
Georges Pascal, Les grands textes de la philosophie (1967)
Ce texte expose 5 tropes (arguments) du philosophe sceptique Agrippa (fin du Ier siècle), qui servent à démontrer que l’on ne peut jamais atteindre la vérité.
Cinq tropes pour l’épochè (1)
1. Le premier a trait au désaccord : nous trouvons que, sur une proposition qu’on nous met sous les yeux, il y a dans la vie et chez les philosophes un désaccord qu’on ne peut trancher ; et par suite, faute de pouvoir préférer ou repousser, nous aboutissons à la suspension du jugement.
2. Le deuxième, c’est la régression à l’infini : nous disons que la preuve qu’on apporte pour garantir la proposition a besoin d’une autre preuve, et celle-ci d’une autre, à l’infini ; aussi, puisque nous ne savons où commencer le raisonnement, la suspension du jugement est-elle la conséquence naturelle.
3. Le troisième est tiré de la relativité : l’objet apparaît tel ou tel selon celui qui juge et selon les concomitants de l’observation, mais nous nous abstenons de juger ce qu’il est par nature.
4. Le quatrième mode est celui du postulat ou de la position de base : rejetés à l’infini, les Dogmatiques prennent un point de départ qu’ils ne prouvent pas, mais auquel ils jugent digne de donner leur assentiment absolument et sans démonstration.
5. Le cinquième mode est celui du cercle vicieux (diallèle) : ce qui doit confirmer la chose en question a besoin d’être prouvé précisément par la chose en question ; aussi, ne pouvant prendre ni l’un ni l’autre pour trouver l’autre, nous abstenons-nous de juger de l’un et de l’autre.
Il est possible de ramener à ces modes tout ce qui est en question.
(1) L’“époché” signifie la suspension du jugement. C’est l’attitude que préconisent les sceptiques, qui pensent que l’on ne peut jamais être certain de rien.

Exercice

Lisez l’article de philosophie magazine.

  1. Cherchez dans le texte de G. Pascal à quels tropes correspondent les contre-arguments du textes.
  2. Écrivez un dialogue entre Jacques Derrida et vous qui le réfutez à l’aide d’arguments sceptiques.

Philosophie Magazine : utiliser les tropes sceptiques contre Jacques Derrida


« Le débat porte sur le rapport entre guerre et religion : votre adversaire soutient, comme Jacques Derrida dans Foi et Savoir (1996), que « toute guerre est au fond une guerre de religion ». Il en déduit que moins de religion conduirait à la paix.

  • Pour le réfuter, relativisez son point de vue en citant un contre-exemple (« la guerre menée par les Soviétiques en Afghanistan n’était pas, selon moi, religieuse »).
  • S’il intègre votre objection à sa thèse (« on a vu des popes bénir des chars russes »), soulignez la discordance de ses arguments (« sacraliser une arme ne fait pas d’une guerre une guerre de religion »).
  • Votre interlocuteur explique que lorsqu’on cherche la cause d’une guerre, on tombe toujours sur un motif religieux (« l’attentat de Sarajevo de 1914 n’a-t-il pas été commis par un orthodoxe contre un catholique ») ? Rétorquez que, à ce compte-là, on tombera dans la régression à l’infini (« vous pourriez aussi invoquer la Providence… »).
  • Enfin, si votre adversaire en vient à identifier tout État à une forme d’idéologie religieuse (« certains Allemands n’appelaient-ils pas les communistes : “die rote Kapelle”, la “chapelle” ? »). Dites-lui qu’il commet là une pétition de principe (« si tout État a une dimension religieuse, la guerre se faisant entre États aura forcément un aspect religieux »).
  • Achevez-le en affirmant que son argumentaire cache un diallèle, un argument circulaire (« vous voulez démontrer que la religion cause les guerres, car, pour vous, toute guerre est d’origine religieuse »), et vous aurez appliqué là avec succès les cinq tropes (armes) du philosophe sceptique Agrippa (fin du Ier siècle). »

Synthèse : relativisme vs scepticisme

Exercice

Faire un tableau à deux colonnes : SCEPTICISME - RELATIVISME et comparer ces deux doctrines : leur représentant principal / leur thèse / leurs arguments / Les problèmes que cela pose.

  RELATIVISME SCEPTICISME
Représentant    
Thèse    
Arguments    
Problèmes    

Travaux facultatifs

Voir dans le menu les deux travaux facultatifs :


Table des matières